Décret n°2009-302 du 18 mars 2009 portant application de l’article L. 132-1 du Code de la consommation modifiant les articles R. 132-1 ; R. 132-2 et R. 132-2-1 du Code de la consommation.
Dans une société de consommation, le droit accorde une place dérogatoire au consommateur[1], considéré comme sans défense face aux contrats qui lui sont imposés et auxquels il ne peut qu’adhérer, c’est-à-dire qu’il ne peut pas en négocier les stipulations. Soit il accepte, soit il s’en va voir ailleurs.
Ces contrats protègent le professionnel, le protège parfois trop : limitation de ses obligations, de sa responsabilité, reconduction tacite du contrat, indemnité de rupture pour le consommateur qui souhaiterait laisser le vent l’emporter vers d’autres horizons contractuels… Tout cela avec une information minimum. Les conditions générales suffiraient.
Face à cette situation, l’article L. 132-1 du Code de la consommation sanctionne les clauses d’abusives. Celles-ci sont réputées non écrites, comme si elles n’avaient été prévues au contrat.
Ces clauses sont ainsi définies : « Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. »
Cette définition, si elle éclaire le juriste et l’étudiant, n’éclaire pas le praticien. Quelles sont les clauses qui seront considérées comme abusives par le juge ?
- Pour le professionnel : Quelles sont les clauses que l’on peut prévoir sans risque ?
- Pour le consommateur : Quelles sont les clauses que l’on peut contester ?
Dans ce climat d’incertitude, un décret a encadré le pouvoir d’appréciation des juges en établissant une liste indicative des clauses irréfragablement abusives[2], ou simplement présumées abusives. Certaines de ces dispositions sont superflues, ne faisant que reprendre le droit commun. Elles ne présentent qu’un intérêt très limité, posant la question de l’exacte similitude des notions.
On pourrait lister les clauses principales selon un code couleur :
Liste noire = clause abusive
- Le fait d’imposer des conditions supplémentaires non prévues par le contrat ni par un autre document mentionné dans le contrat ;
- Exemple : certaines banques imposent automatiquement une tarification de leur service. Notamment, celles-ci ont une obligation légale d’information annuelle des cautions. Si aucun tarif n’a été prévu par le contrat ou autres documents d’information transmis aux cautions en même temps que le contrat, la banque ne peut pas facturer ce service.
- Le fait de permettre au professionnel de modifier unilatéralement[3]: la durée du contrat ou le prix du bien/service ;
- Remarque concernant les clauses de durée : il s’agit d’une hypothèse d’école dans la mesure où la plupart des contrats contiennent une clause de tacite reconduction par laquelle le contrat est considéré comme renouvelé pour la même durée, sauf à avoir été résilié antérieurement. Le consommateur non averti, négligeant la date d’anniversaire de son contrat, risque fort de se trouver de nouveau engagé à son insu. Avis au consommateur, n’oubliez pas les anniversaires ! On ne vous le rappellera pas forcément !
- Exemple : dans les contrats de téléphonie, le professionnel ne peut pas modifier unilatéralement les tarifs de l’abonnement souscrit par le consommateur, sauf acceptation de sa part, acceptation qui peut être simplement verbale.
- Le fait de supprimer l’exception d’inexécution au bénéfice du consommateur ;
- Explications : si le professionnel n’exécute par ses obligations envers le consommateur, il ne peut pas exiger de celui-ci qu’il exécute sa part du contrat !
- Exemple : dans un contrat internet avec installation du modem par le commerçant, celui-ci ne peut exiger le paiement de l’intervention et de l’abonnement téléphonique, tant que l’installation du modem n’est pas effective.
- Dans une certaine mesure, le fait de restreindre le droit de rupture du contrat à durée indéterminée (résiliation ou résolution) :
- Le fait d’interdire au consommateur de rompre le contrat en cas d’inexécution grave du professionnel (délivrance ou garantie du bien ou fourniture du service) ;
- Le fait de conserver le paiement du consommateur pour des prestations non réalisées en cas de résiliation discrétionnaire[4] par le professionnel ;
- Le fait d’imposer une indemnité de rupture (dans les contrats à durée indéterminée) ;
- Le fait d’imposer une durée de préavis plus longue au consommateur qu’au professionnel ;
- Cette hypothèse se rencontre régulièrement dans la pratique.
- Dans tous les contrats, le fait de prévoir un droit de résiliation discrétionnaire au bénéfice exclusif du professionnel ;
Liste rouge ≥ ou ≤ clauses sûrement abusives
Certaines clauses sont seulement présumées abusives : il revient donc au professionnel – et non au consommateur – de prouver que ces clauses sont valablement stipulées.
Une vigilance particulière du professionnel est donc nécessaire :
- Le fait de prévoir une indemnité de dédit pour le consommateur et non pour le professionnel ;
- Le fait de ne pas respecter une durée de préavis de rupture du contrat suffisante de la part du professionnel ;
- Exemple : dans les contrats de service, tels que les abonnements internet, une durée de préavis suffisante devra être respectée par l’opérateur.
- Le fait de prévoir des conditions de rupture du contrat plus restrictives pour le consommateur que pour le professionnel ;
- Attention : les contrats prévoient souvent de telles clauses.
- Le fait de restreindre le droit d’agir en justice pour le consommateur ;
- Exemple : si le contrat fait référence à l’arbitrage, il s’agit d’une justice onéreuse par principe réservée aux professionnels.
Liste verte ≠ clauses non abusives
Autant le dire simplement : il n’y en a pas ! Le juge dispose d’un pouvoir souverain d’appréciation de l’équilibre contractuel et peut qualifier toute clause de clause abusive. Il apprécie la clause par rapport à l’ensemble des stipulations contractuelles. Tout est une question d’équilibre.
Le professionnel, en rédigeant ses contrats, devra effectuer un travail d’équilibriste en prenant garde de ne pas trop tendre le fil directeur du contrat en sa faveur sous peine de voir bouleversée l’économie du contrat.
[1] Par consommateur, il faut ici entendre à la fois le consommateur et le non-professionnel.
[2] Irréfragable : qui ne peut pas être qualifié autrement
Mais c’est triste ici, il n’y a qu’un article !
Il faut que Raphy t’apprenne à utiliser la fonction MORE, sinon on voit pas où on doit laisser les commentaires.
les autres articles arrivent! le blog vient de s’ouvrir et s’alimentent en fonction du rapport intérêt de l’actualit / charge de travail / temps de sommeil!