L’organisation de loteries (jeux de hasard)

Les opérations commerciales : organisation de loteries

 L’organisation d’animations commerciales telles que des loteries (jeu de hasard) est une opération marketing que peuvent mettre en place les sociétés pour développer leur clientèle.

L’organisation de loteries est soumise à une lourde réglementation qui nécessite pour l’organisateur la plus grande attention.

À titre liminaire, il convient de noter que ces dispositions s’appliquent tant aux rapports entre professionnels et consommateurs que dans les rapports entre professionnels.

Textes applicables :

La loi du 21 mai 1836 modifiée par les lois n°89-421 du 23 juin 1989 et n°92-1336 du 16 décembre 1992 régissent le régime juridique des loteries.

Dans les rapports entre professionnels et consommateurs, des dispositions du Code de la consommation trouvent également à s’appliquer ; il s’agit notamment de l’article L. 121-36 du Code de la consommation.

Définition de la loterie :

L’article 2 de la loi du 21 mai 1836 définie les loteries :

« Sont réputées loteries et interdites comme telles : les ventes d’immeubles, de meubles ou de marchandises effectuées par la voie du sort, ou auxquelles auraient été réunis des primes ou autres bénéfices dus, même partiellement, au hasard et généralement toutes opérations offertes au public, sous quelque dénomination que ce soit, pour faire naître l’espérance d’un gain qui serait acquis par la voie du sort ».

La loterie se distingue du concours en ce que le concours n’est pas basé sur le hasard pour départir les participants mais sur leurs aptitudes. L’organisation de concours est libre. La jurisprudence veille à bien distinguer les deux opérations et n’hésite pas à requalifier un concours en loterie illicite le cas échéant.

Le principe légal d’interdiction des loteries tempéré par la jurisprudence :

Le principe d’illicéité des loteries est un délit puni par une peine d’emprisonnement de 2 ans et par une peine d’amende de 30.000 euros. À ces peines, s’ajoute la possibilité pour le tribunal de condamner l’auteur à une peine d’amende égale au quadruple des montant des dépenses publicitaires consacrées à l’opération.

Il s’agit d’un délit contraventionnel : peu importe l’intention de l’auteur, dès lors que les quatre conditions constitutives de l’infraction sont réunies, les faits sont pénalement répréhensibles.

Les quatre conditions sont :

–       une offre au public ;

–       l’espérance d’un gain

–       déterminé par le hasard ;

–       en contrepartie d’un sacrifice pécuniaire du participant.

La jurisprudence est venu tempérer la rigidité de la loi en décidant que la loterie était licite si elle était gratuite c’est-à-dire sans aucun sacrifice pécuniaire de la part du participant à la loterie ce qui implique l’absence d’obligation d’achat (Cass. crim. 1er juillet 1931).

Si la loi faisait référence à « toute espèce de loterie », la jurisprudence considère comme licite une loterie à titre gratuit.

Cette jurisprudence a été confortée par le droit de la consommation qui prévoit la validité des loteries à titre gratuit dans les rapports entre professionnels et consommateurs.

Exceptions légales au principe d’illicéité des loteries à titre onéreuse :

Il existe cependant des exceptions légales au principe d’illicéité qui concerne :

–       exclusivement les œuvres de bienfaisance, les arts et les sports : ces loteries sont organisées par les autorités administratives avec l’autorisation du préfet du département de l’organisme bénéficiaire — ou par le préfet de police pour Paris (art. 5 loi 1836) ;

–       les lotos traditionnels en cercle restreint organisé dans un but exclusivement social, culturel, scientifique, sportif ou d’animation (art. 6 loi 1836) ;

–       les fêtes foraines qui doivent n’offrir que des lots en nature, qui fonctionne avec une mise unitaire d’un montant maximal d’1,52 euros, et qui ne proposent pas de lots dont la valeur excède trente fois le montant de la mise unitaire (art. 1 du décret n°87-264 du 13 avril 1987) ;

–       la loterie nationale (art. 136 loi 1836), permettant par voie de décret d’autoriser certaines loteries organisées à l’échelle nationale (Tac-o-Tac…) — il est prévu l’intervention de la société La Française des Jeux en vertu du décret n°78-1067 du 9 novembre 1978 ;

–       les jeux télévisés selon certaines conditions (décret n°92-280 du 27 mars 1992).

L’attribution de lots :

La loi interdit l’attribution de certains lots.

Ainsi, l’article 17 de la loi du 22 juin 1989 interdit « l’attribution en lot ou en prime de tout animal vivant, à l’exception des animaux d’élevage dans le cadre de fêtes, foires, concours et manifestations à caractère agricole ».

Dans les rapports entre professionnels et consommateurs :

Le Code de la consommation impose diverses obligations aux professionnels organisateurs de loteries à l’attention des consommateurs dont le non-respect est constitutif d’une infraction pénale passible de 37.500 euros d’amende (art. L. 121-41C. conso.). Il y a autant d’infraction que de destinataires de bulletins individualisés.

Il est rappelé le tempérament jurisprudentiel porté au principe de prohibition des loteries : pour être licite, la loterie doit être organisée à titre gratuit ce qui implique qu’il n’y ait « aucune contrepartie financière, ni dépense sous quelque forme que ce soit ». Il ne doit pas y avoir d’obligation d’achat préalable pour pouvoir participer à la loterie.

La rédaction d’un règlement de jeu déposé chez un huissier de justice est une obligation légale (art. L. 121-38 du Code de la consommation). Le règlement doit inventorier les lots à gagner en précisant le nombre exact de lots. Ils doivent être listés par ordre de valeur croissante ou décroissante.

L’officier ministériel doit s’assurer de la licéité du règlement de jeu.

Par ailleurs, tout document de présentation de la loterie doit comporter une partie où sont mentionnés exclusivement les éléments suivants :

–       la mention : « le règlement des opérations est adressé, à titre gratuit, à toute personne qui en fait la demande » ;

–       l’adresse à laquelle peut être envoyée la demande de règlement et le nom de l’officier ministériel auprès de qui le règlement a été déposé.

Autres sanctions applicables :

Civilement, il convient de préciser que l’acceptation du règlement de jeu par le participant crée un contrat avec l’organisateur qui est dès lors contractuellement engagé à l’égard des participants.

Le fait de faire espérer un gain de façon dolosive crée ce que l’on nomme un « quasi-contrat » qui engage l’organisateur de la loterie à délivrer le lot faussement promis.

Pénalement, le fait de faire une annonce fallacieuse ou de faire espérer un lot fallacieux est passible du délit de pratique commerciale trompeuse (art. L. 121-1 C. conso.).

 

Si l’organisation de loteries peut être une opération commerciale intéressante économiquement, il convient d’être vigilants au régime juridique applicable.

Documentissime

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2 réponses à “L’organisation de loteries (jeux de hasard)”

  1. A.P. dit :

    Bonjour,

    Avant tout, je vous remercie pour cet article qui est très clair.

    Ayant été posté en 2011, serait-il possible de savoir dans quelle mesure l’organisation des loteries est affectée par l’article 19 de l’ordonnance n° 2012-351 du 12 mars 2012, qui, si je ne m’abuse, abroge la loi de 1836 ?

    Merci d’avance

  2. Bonjour,

    La loi de 1836 a effectivement été abrogée. Ses dispositions ont été reprises par le Code de la sécurité intérieure aux articles L. 322-1 et suivant.
    En outre, les dispositions du Code de la consommation n’ont pas été modifiées.

    L’abrogation de la loi de 1836 ne crée donc aucune modification dans la législation applicable aux loteries et jeux de hasard.

    Merci pour votre remarque.

    Bien cordialement,

    Vanessa Frasson
    Avocate

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