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Se faire tromper par sa clause attributive de compétence

jeudi 3 décembre 2009

Avis aux rédacteurs de contrat !

S’il y a bien une clause qui n’attire pas l’attention, c’est la clause attributive de compétence : on l’intègre au contrat sans trop y penser, son enjeu est des plus limité sur le terrain de la négociation ! Mais justement, pensons-y !

D’abord, il convient de choisir entre une clause compromissoire (arbitrage) et la clause attributive de compétence. Si l’arbitrage est une justice pour des professionnels rendue par des professionnels, c’est une justice onéreuse qui ne convient pas forcément à toutes relations commerciales, même d’une forte assise financière. Si elle représente un choix intéressant pour sauvegarder la confidentialité d’informations  très sensibles, elle peut représenter un piège financier. Pas toujours à conseiller, on lui préferera souvent la clause attributive de compétence.

Oui, mais le droit français distingue entre deux régimes de responsabilité : la responsabilité contractuelle et la responsabilité délictuelle. Les frontières, si elles n’ont jamais été strictement définies, ne font que s’assouplire davantage avec les évolutions législatives et jurisprudentielles. Ainsi, tout litige découlant d’un contrat ne relève pas de la responsabilité contractuelle : certains litiges nés du contrat en lui-même relèvent de la responsabilité contractuelle tandis que les litiges – même entre les parties – qui découlent des effets du contrat relèvent de la responsabilité délictuelle.

Ainsi de l’exemple de la rupture des relations commerciales établies de l’article L. 442-6 I 5° du Code de commerce ! Entre contractuelle et délictuelle, on ne savait plus… Après des arrêts confus, contradictoires, la Cour de cassation a opté de façon claire pour le régime de la responsabilité délictuelle. Cela a deux conséquences principales:

– la jurisprudence ne reconnaît toujours pas de qualification juridique aux relations contractuelles suivies – groupe de contrats, contrats liés … Il faut s’en référer à des dispositions légales spécifiques. En effet, de choisir le régime de la responsabilité délictuelle n’est pas anodin. Ce n’est pas la rupture du contrat qui est fautive – et qui relèverai du régime de la responsabilité contractuelle – mais la rupture de la relation qui elle est un fait juridique pour les tribunaux.

– mais surtout, les questions de responsabilité se sont posées en présence de clauses attributives de compétence de juridiction commerciale. Et là, tout est dans l’art de rédiger sa clause !

Si la clause attributive de compétence porte sur les « litiges contractuels », elle n’englobe que la responsabilité contractuelle. La clause attributive de compétence de juridiction ne trouvera pas à s’appliquer à la rupture brutale des relations commerciales établies. Quand bien même la relation est-elle commerciale, la clause sera écartée (Cass. com. 13 janv. 2009 n°08-13.971).

Mais si la clause attributive de compétence mentionne les « litiges nés à l’occasion du contrat », elle englobe à la fois le régime de responsabilité contractuelle et le régime de responsabilité délictuelle découlant des effets du contrat. La rupture brutale des relations commerciales établies est donc incluse dans le périmètre d’action de la clause attributive de compétence (Cass. civ. 1ère, 22 oct. 2008, n°07-15.823).

Conséquence procédurale déterminante en cas de litige, les rédacteurs doivent soulever ce point aux parties qui ne peuvent se douter des complexités de choix de juridiction !